samedi 13 juin 2009

Premier coup d'oeil sur Berlin

Le vent soufflait. La terre était loin en bas. Je me cramponnais à mon siège. Le vol qui devait nous mener de la Belgique à l'Allemagne ressemblait plus à une périlleuse ballade en deltaplane qu'à un paisible voyage en avion. Vivement l'atterrissage !

Berlin...

De toutes les villes que nous avions visitées jusqu'à maintenant, Berlin était la plus décevante. Loin d'être dépaysant, aux premiers abords, ce lieu avait quelque chose de très américain : Dunking Donuts, Starbucks, H & M se trouvant à tous les coins de rue.

Seulement, il ne suffisait que de mettre de côté ces premiers préjugés, cette première déception et d'entrer dans un petit restaurant du coin. J'avais soudainement l'impression de pénétrer dans un tout autre univers. À l'intérieur, on ne parlait qu'Allemand. Étais-je heureuse d'avoir la permission de dire n'importe quoi sans qu'on me comprenne ou sentais-je un profond sentiment d'isolement s'installer en moi ? Pour tromper cette angoisse naissante, mes yeux commencèrent à se promener tout autour de moi. Il y avait d'abord un serveur dont la voix et la moustache donnaient à ses traits une allure typiquement caricaturale. L'atmosphère sombre, les lampes suspendues, les vieilles «shops» de bière en exposition annonçaient les traces d'une nouvelle culture que j'aimais déjà. La grande assiette bien remplie qu'on venait de déposer devant moi exhalait une délicieuse odeur de chou au vinaigre, de saucisses et de jambon; c'était de la choucroute... mmm !

Bien repue, lorsque je ressortis à l'extérieur, mon regard avait changé. Je me laissai alors emporter par l'architecture des lieux. La multiplicité des styles qui se côtoyaient d'un édifice à l'autre avait quelque chose d'intrigant. D'une part, il y avait de très vieilles bâtisses ornées de mille agréments qui respiraient le fil du temps. D'une autre part, on découvrait des constructions grises dont la froideur et la rigidité de fer n'annonçaient rien de très joyeux. Mêlés à tout cela se trouvaient des bâtiments aux allures modernes, très modernes. Berlin était vraiment une ville éclectique! J'en compris vite la raison; Berlin était aussi une ville riche d'histoire.

Ce fut par ce dernier point que je fus totalement conquise. Je voulus tout à coup tout savoir, tout comprendre : Napoléon, les Nazis, la guerre, le mur de Berlin, le Communisme. C'était par la Porte de Brandebourg qu'on avait photographié Hitler déambulant triomphant dans la ville. C'était du Reichstag, parlement allemand, qu'il dirigea son empire jusqu'au fameux incendie de 1933. Le dôme de la Cathédrale de Berlin fut l'un de ces chefs-d'oeuvres démolis par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale. Sillonnant les rues, une longue ligne marquait toujours l'emplacement de l'ancien mur que les Soviétiques avaient construit pour séparer la ville en deux. Près d'un cours d'eau, quelques croix blanches rendaient un dernier hommage à ces hommes et femmes morts en tentant de fuir vers l'Ouest. Perdu sur la rue Friedrich, s'érigeait encore et timidement le « Checkpoint Charlie », poste qui servait autrefois à passer la frontière entre Berlin-Est et Berlin-Ouest.

Je me laissai ainsi saisir par l'esprit de Berlin. En une journée, en une soirée, je vivais sa vie : colère face à l'innommable, tristesse en pensant aux drames de tous ces gens, inquiétude par rapport au genre humain, incompréhension devant sa folie. Malgré le mouvement et la joie propres à chaque ville, je gouttais au malaise profond qui planait encore. Berlin « saigne l'histoire »... *

* Citation reprise de Maus, Art Spiegelman.

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